Il est très facile de passer à coté ou de sous estimer un déficit transversal. Beaucoup de récidives sont dues à cette erreur, et il n’est pas illogique en cours de traitement de revenir à une thérapeutique traitant ce déficit. Alors certes, si l’on est un adepte de l’extraction, on arrivera à caser tout le monde, et si la langue n’est pas trop volumineuse, personne n’en saura rien. Mais si l’on est un conservateur, il faut se donner les moyens de ses ambitions. On ne casera pas toutes les dents sur un maxillaire parce que l’on va équiper le patient d’attaches autoligaturantes et adopter une philosophie idoine. De même que l’on n’aura pas des conversations plus intelligentes parce que l’on a un iPhone. Alors quels éléments diagnostics utiliser?
- La téléradiographie de face (je ne sais pas trop m’en servir, je vous la laisse)
- L’inclinaison des molaires. Si vous avez une endoalvéolie avec des molaires maxillaires déja versées en vestibulaire, vous avez de grandes chances d’être confronté à une endognathie.
- Le bon sens, qui a de l’avenir comme tout le monde le sait…
POUR NE PAS MANQUER D’AIR
Il est vrai que dans notre imaginaire, le coup de la vis qui tourne pour « écarter un palais », c’est un peu rude.
Il faut penser que l’expression « donner un tour de vis », prend son origine chez les bourreaux, qui avec des machines fort simples, vous faisaient dire ce qu’ils voulaient, puis fut attribué à une éducation rigoureuse ou l’on emprisonne le malheureux enfant dans un carcan, que l’on resserre à l’envie, sied à merveille à notre discipline complexe. Mieux, on transforme le parent en bourreau, puisque c’est lui qui tourne, reportant ainsi la dimension douloureuse hors de nos murs.
On n’y réfléchit pas ou peu, mais en demandant ce geste aux parents, il faut argumenter pour les déculpabiliser. Bien sur qu’il vont donner les tours, c’est pour le bien de leur progéniture, et puis dans la plupart des cas ils ont payé un traitement mal remboursé, donc ça motive pour aller de l’avant, ce n’est pas pour enfermer l’enfant mais au contraire pour le faire « évoluer » dans le sens de l’ouverture. Est ce que cela fait mal? Oui, cela va tirer. Est ce que le patient va souffrir? Non, à raison d’un quart de millimètre le tour, et s’il y a plusieurs tours, bien répartis dans la journée, il n’y a pas de souci. Les effets secondaires sont explicités pour ne laisser aucune place au doute: le « Yannick Noah style », donc le diastème interincisif, qui disparait tout seul quelques semaines après la fin des activations, et la diplopie (le patient qui voit double) phénomène trés rare et surtout constaté lorsqu’il y a trop d’activations par jour. C’est le jour ou vous n’en parlerez pas, que ça va arriver, donc on glisse toujours un mot la dessus. Vous pouvez voir sur le schéma de type « Darth Vador » ci dessus les sutures sollicitées par la disjonction.
La disjonction de l’enfant constitue « la seul et unique thérapeutique orthopédique d’expansion transversale du maxillaire » reconnue scientifiquement.
On peut parler de son ami le quadhélix, mais rien n’a été prouvé sur lui, au niveau osseux dans des études sérieuses.
A savoir qu’on peut décrire une action sur la suture chez certains patients, mais il faut se rappeler qu’une ou deux exceptions ne font pas une règle.
Des disjoncteurs sans vis, avec des matériaux à mémoire de forme existent, je ne les ai pas utilisé personnellement donc je me garderai de me prononcer dessus, toutefois la précision des disjoncteurs à vis en fait un système de choix.
50% d’effets squelettiques chez le jeune enfant et 35% chez l’adolescent
Les revues de la littératures considérent que la réponse osseuse, sur le volume des fosses nasales intervient de façon conséquente avant le pic de croissance. Entendons nous bien, cela peut arriver après, mais statistiquement cela est plus aléatoire. 50% d’effets squelettiques chez le jeune enfant et 35% chez l’adolescent, ça fait réfléchir non?
Cela veut donc dire, que l’effet d’une disjonction est essentiellement alvéolaire, alors si les corticales sont fines cela devient dangereux pour l’avenir parodontal des dents. La vrai solution à ce problème est surement de faire une disjonction avec des appuis intraosseux de type minivis d’ancrage. Cela est actuellement l’objet d’études.
Pour revenir dans un cadre confraternel, méfiez vous de ces praticiens qui vous montrent un ou deux cas magnifiques de disjonctions à 17, voire 25 ans…
Certainement les dents ont bougé, extérieurement, et le patient est satisfait. Mais qu’en est il au niveau osseux. N’a t on pas au mieux déplacé de l’os alvéolaire ou peut être n’est ce que la dent dans ce qui lui reste de corticale. Et quand bien même on aurait eu un agrandissement du volume des fosses nasales, quand vous lancez un plan de traitement et que la science vous dit: « vous avez 8% de chance d’obtenir ce que vous souhaitez » (donc 92% de vous planter), se lancer la dedans, même en prévenant le patient, est un peu cavalier.
Sans parler, de généraliser sa réussite pour montrer aux confrères que vous êtes définitivement le meilleur, sans préciser que l’on a pris beaucoup de risques d’échouer, c’est pour le coup irresponsable. Pour continuer dans cette disgression, ce qui manque à l’orthodontie contemporaine, ce sont arbres décisionnels. Un urgentiste devant un problème médical, n’improvisera pas son traitement. Il a des « conduites à tenir », normées, quantifiées, statistiquement vérifiées, et mises à jour. Elles sont d’ailleurs juridiquement opposables. Les progrès de l’orthodontie contemporaine seront plus intellectuels que matériels.
cas clinique
Voici un cas clinique pour illustrer une disjonction sur un garçon de 11 ans. La vue occlusale des moulages se trouve ci dessus. Notons que si sur cette vue, l’endomaxillie ne saute pas aux yeux, lorsque vous rajouttez les canines qui ne sont pas sorties, vous avez une belle arcade en V.
Problème qui pourrait être contourné par des extractions de prémolaires, (pour faire de la place), mais comment contracter durablement une arcade mandibulaire?
Le choix de la disjonction s’impose alors et le moment est théoriquement idéal pour la réaliser (avant le pic de croissance donc). Vous pouvez utiliser plusieurs méthodes, dont la comparaison de l’ossification des vertèbres, la radio du poignet, la taille des chaussures…
Vous voyez ci contre la quantité de disjonction.
Le résultat sera d’autant plus stable, que la suture intermaxillaire se sera ossifiée. Le rythme de la disjonction sur 8 mm a été de 2 tours par jour. Sachant qu’une activation (qui est en fait 1/4 de tour) représente 1/4 de mm. Un conseil, il vaut mieux parler en nombre d’activations plutôt qu’en nombre de tours. C’est plus précis, et cela peut éviter des catastrophes, des avions se sont écrasés pour des erreurs de normes. Ici 8 tours ont été nécessaires, donc 32 activations, à raison de 2 activations par jour, cela fait 16 jours d’activation. Le patient est revu précisement au bout de ces 16 jours, en précisant que si le RDV est un peu après, la date d’arrét de l’activation lui est donnée par écrit.
J’ai encore en mémoire un parent qui n’était pas venu au rendez-vous de contrôle et avait continué les activations. Il était revenu parce que le patient, donc son fils se plaignait de douleurs. Forcément avec la moitié des racines canine et molaire dehors, ça agaçait un petit peu la pulpe.
Il est recommandé de surcorriger les disjonctions, donc rajoutter 1 mm de plus que nécessaire, et conserver le disjoncteur en place au moins 4 mois le temps de la cicatrisation osseuse. L’étirement de la suture est dans un premier temps élastique (ligamentaire) puis l’ossification se fait de façon concentrique en direction de la suture intermaxillaire.
4 mois est une moyenne, parfois un transpalatin est nécessaire quelques mois de plus.
Et en interception, vous pouvez retrouver un petit morphing ici